[La pétition est close.]
Monsieur le Ministre,
Les enseignants de langues s’étaient réjouis successivement :
– de l’annonce d’une évaluation de la compréhension de l’oral (CO) lors de la réforme des épreuves du baccalauréat STG en 2005 [1] ;
– puis de l’introduction expérimentale de la CO au bac STG en 2006-2007 pour les établissements volontaires [2], même si certains pouvaient émettre des réserves concernant l’introduction au baccalauréat, dans les conditions actuelles, d’une note de contrôle en cours de formation.
Le fait que cette expérimentation ait été élargie et rendue obligatoire pour l’année scolaire 2007-2008 [3] avec une note portée sur les livrets scolaires, laissait penser à tous que l’introduction de l’évaluation de la CO à ce baccalauréat était acquise, et que sa généralisation à toutes les filières était d’ores et déjà envisagée.
C’est donc avec stupéfaction et indignation que nous avons appris la suppression de cette l’évaluation de la CO au bac STG, en constatant que la dernière instruction officielle concernant cette filière n’en faisait plus mention [4], alors même qu’aucune évaluation globale officielle de cette expérimentation n’a été réalisée, ou du moins publiée.
Les arguments qui nous semblent imposer le maintien de cette évaluation de la CO sont nombreux et forts :
1. Les élèves ont en général une compétence supérieure en compréhension qu’en expression : l’évaluation à part de la CO est donc très positive pour le maintien de leur motivation ; en particulier, elle crée et entretient un sentiment de réussite au moins partielle même chez les élèves les plus faibles.
2. La suppression de cette épreuve risque de porter un coup d’arrêt à l’entraînement indispensable des élèves passant un examen national français à toutes les stratégies de CO : stratégies d’écoute, d’accès au sens, de compensation, etc.
3. Il est important d’entraîner de manière autonome la CO pour les épreuves de certification internationale que pourront par la suite passer les élèves.
4. Il était annoncé dans la note de service du 16 novembre 2006 que « l’évaluation de la compréhension de l’oral a vocation à constituer la troisième partie d’épreuve de langues vivantes de la série STG, que ce soit en LV1 ou en LV2 (...) en lien avec les dispositions du Cadre européen commun de référence pour les langues ». Il y a donc contradiction entre cette suppression de l’évaluation de la CO et, dans les Programmes officiels actuels de toutes les filières, la référence faite désormais à ce Cadre, dont les échelles de compétence intègrent la CO parmi les cinq activités langagières à évaluer.
5. Cette suppression est contradictoire en outre avec la demande officielle adressée aux enseignants - de manière très récurrente et très médiatisée - pour qu’ils améliorent les résultats des élèves français en langues étrangères.
6. Cette suppression d’une innovation officielle avant même l’évaluation correspondante crée un fort sentiment de gâchis non seulement chez les collègues qui se sont investis depuis le début dans la conception et l’expérimentation de cette épreuve, mais chez tous les enseignants de langues. Après l’affaire récente de la validation du niveau A2 au Diplôme National du Brevet 2008, imposée contre l’avis de toutes les instances consultatives et gérée dans des conditions déplorables, la leçon que risquent de retenir de nombreux enseignants de langues est que l’investissement dans l’innovation est aussi lourd qu’inutile, et l’attentisme systématique la stratégie la plus rationnelle.
7. Chez tous les enseignants de langues aussi, il y a une forte inquiétude vis-à-vis d’un processus de privatisation de l’enseignement et de la certification en langues, qu’ils observent actuellement à l’oeuvre : ainsi, des épreuves de CO fournies par des organismes privés sont d’ores et déjà utilisées pour évaluer certains candidats au baccalauréat. La suppression de cette épreuve de CO au baccalauréat STG ne peut que renforcer cette inquiétude.
En conséquence, nous, enseignants signataires, vous demandons non seulement de revenir sur cette décision de suppression, mais d’initier l’extension progressive d’une validation de la CO au baccalauréat de toutes les filières.
Nous vous demandons aussi plus généralement, pour toutes les décisions à venir qui affectent aussi lourdement l’enseignement et l’apprentissage des langues vivantes en France, plus de concertation préalable, et plus de cohérence, d’accompagnement et de suivi dans les décisions prises.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre haute considération.