Communiqué de l’APLV sur la réforme des concours de recrutement

vendredi 11 avril 2025

COMMUNIQUE DE L’APLV SUR LA REFORME DE LA FORMATION DES ENSEIGNANTS

L’Association des Professeurs de Langues Vivantes (APLV) prend acte de la réforme de la formation initiale des enseignants, annoncée le 27 mars 2025. Elle se félicite de certaines avancées, mais formule toutefois plusieurs interrogations et points de vigilance qui conditionnent la réussite d’une telle transformation.

Des objectifs partagés, des intentions encourageantes

La réforme affiche des ambitions légitimes : redonner de l’attractivité à un métier qui connaît actuellement une crise des vocations, et mieux préparer les futurs enseignants à leur entrée dans la carrière en renforçant et étendant leur formation à 5 ans d’études. Le recrutement anticipé dès l’année de L3 permettra aux étudiants de s’investir pleinement dans le master. La rémunération des étudiants en M1 et M2 est un levier important qui leur permettra d’alléger leurs contraintes financières et ainsi de rendre le parcours plus soutenable.

Cependant, des questions essentielles restent en suspens

L’APLV s’inquiète de plusieurs zones d’ombre :
• La place de la didactique et de la recherche : recentrer la formation sur les savoirs disciplinaires ne doit pas se faire au détriment de la réflexion didactique et de la capacité des étudiants à penser leur pratique. La formation des enseignants doit rester articulée à la recherche.
• L’annonce de la disparition du mémoire de recherche au profit d’un seul « mémoire de stage » soulève une inquiétude quant au risque d’affaiblissement de la dimension réflexive pourtant essentielle au développement professionnel des futurs enseignants. Pour pouvoir « s’engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel » (compétence C14 du référentiel de compétences des métiers du professorat et de l’éducation), il est indispensable d’avoir été initié à la problématisation d’un sujet, à la recherche documentaire rigoureuse et à la vérification critique des sources. La formation par la recherche permet justement aux étudiants de dépasser les idées reçues, d’adopter une posture distanciée face aux discours dominants, et de construire des savoirs appuyés sur des travaux scientifiques, contribuant ainsi à l’autonomie intellectuelle et à l’émancipation professionnelle.
• Le positionnement du concours pendant l’année de L3 réduit la formation disciplinaire des étudiants. L’acquisition de connaissances dans les cultures et littératures des pays dont ils vont devoir enseigner la langue et la réflexion sur des thématiques fines et exigeantes sont des atouts dans les parcours de licence actuels, dont il risque d’être dommageable de se priver.
• L’absence de référence aux dispositifs de mobilité internationale pour les futurs enseignants de langues vivantes est une lacune majeure : un séjour long à l’étranger reste une condition indispensable pour enseigner une langue avec aisance.

Une réforme ambitieuse ne peut se faire sans les acteurs de terrain et dans la précipitation. Une refonte du calendrier, voire un report de la mise en place de la réforme sont souhaités :
• Il est difficilement envisageable, d’ici à la rentrée universitaire, d’avoir refait, dans chaque université, les maquettes des formations sans connaître la nature exacte des épreuves du nouveau concours. A l’heure actuelle, les épreuves des concours portent principalement sur la didactique des disciplines, comment réorganiser les services pour mettre en place des enseignements qui seraient en licence majoritairement disciplinaires, la didactique intervenant surtout dans les deux années de master ?
• Il est nécessaire de proposer des sujets zéro à destination des formateurs préparant aux épreuves écrites et orales.

L’APLV appelle à une concertation plus large, impliquant les associations disciplinaires, les formateurs, les chercheurs et les universités, avant toute mise en œuvre précipitée. Le calendrier annoncé, sans précisions suffisantes sur les nouvelles épreuves, rend difficile la refonte sereine des formations à l’université.

Nous partageons le besoin de réformer, mais refusons qu’il se fasse sans dialogue, sans clarté et sans garantie de qualité.

L’APLV reste pleinement mobilisée pour contribuer, dans un esprit constructif, à une formation ambitieuse, cohérente et adaptée aux défis de l’enseignement des langues vivantes, dans le premier et le second degrés, aujourd’hui.

Le Conseil d’Administration de l’APLV