Réaction de l’APLV aux propostions de Valérie Pécresse, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche sur la réforme des concours d’accès aux grandes écoles

vendredi 1er octobre 2010

En janvier 2010, l’idée d’établir des quotas pour les boursiers avait suscité un vent de panique parmi les dirigeants des grandes écoles, farouchement opposés à une supposée baisse de niveau en cas d’ouverture sociale.

Pour tenter de comprendre les blocages et y apporter des solutions, Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, avait commandé voilà quelques mois un rapport à l’Inspection générale. En exclusivité, elle dévoile sur l’Express.fr les premières conclusions et les idées qu’elle retient pour permettre aux moins favorisés d’intégrer les formations d’excellence.

Parmi ses propositions pour adapter les concours d’entrées aux grandes écoles elle propose de repenser les épreuves de langues. Les ouvrir notamment aux langues maternelles des candidats, que ce soit le chinois, l’arabe, le vietnamien ou autre. Se cantonner à l’anglais ou à l’allemand pénalise ces étudiants bilingues, qui ne peuvent utiliser leur atout. C’est injuste. En outre, dans les écoles de commerce surtout, les langues sont dotées d’un trop fort coefficient et font chuter des postulants, par ailleurs au même niveau que les autres. Déjà à mon époque, à HEC puis à l’ENA, j’ai croisé des camarades, excellents, qui décrochaient parce qu’ils n’avaient pas eu la chance d’apprendre l’anglais comme d’autres, plus favorisés. Il faut aussi revoir les épreuves : Centrale commence ainsi à privilégier le commentaire de texte à la version. Pas besoin de traduire Shakespeare dans le français de Baudelaire pour évaluer les capacités d’un élève à évoluer dans un pays étranger... lire l’interview de Valérie Pécresse sur l’Express.fr

La réaction de l’APLV

L’APLV soucieuse de promouvoir et maintenir un enseignement diversifié des langues vivantes en France tient, sans exclusive de la présence ultérieure d’autres langues, à la continuité actuelle en classes préparatoires des enseignements d’anglais et d’allemand suivis traditionnellement comme premières langues vivantes dans la scolarité antérieure, ainsi qu’aux épreuves correspondantes des concours aux Grandes Écoles. L’expérience a prouvé que la substitution d’une langue dite « maternelle » ou « native » aux langues existantes, en dehors des difficultés matérielles pour assurer son enseignement ou son évaluation, se fait toujours au détriment de la langue en deuxième position, ici l’allemand cité par la Ministre dans ses propos, mais pas à celui de l’autre langue en première position évoquée conjointement, l’anglais, auquel il sera très difficile dans la pratique de substituer une autre langue.
Or un membre du gouvernement ne peut ni ignorer les traités et relations privilégiées entre la France et l’Allemagne comportant aussi des échanges comme des stages chez le partenaire de hauts fonctionnaires, issus majoritairement des Grandes Ecoles du côté français, ni le fait que les deux pays soient réciproquement les premiers clients l’un pour l’autre, sans parler des entreprises à forte imbrication binationale (EADS, Avantis....), ni les déclarations des récents sommets franco-allemands concernant le renforcement de l’apprentissage des langues de nos deux pays.

L’APLV est au contraire pour une diversification linguistique prévoyant dans toutes les classes préparatoires et aux concours aux Grandes Écoles, y compris scientifiques et techniques, au moins deux langues vivantes obligatoires enseignées en amont dans le secondaire, afin d’intégrer sans aucune exclusive les premières et deuxièmes langues vivantes proposées actuellement sur le territoire, et une troisième langue vivante facultative, pour permettre un élargissement et non un rétrécissement de l’offre, dans laquelle pourrait être incluse cette « langue maternelle » ou « native ».
Les enseignants de langues vivantes sont également les mieux placés pour déterminer les contenus et la nature des épreuves qu’ils ont déjà fait nettement évoluer au cours des dernières années. L’APLV dénonce les propos conférant une image obsolète à la pédagogie des langues vivantes et laissant croire au grand public que l’enseignement des langues vivantes en France constitue un obstacle à la fois à la promotion sociale et à l’essor économique international de notre pays, alors que la réussite de nombreux étudiants et le niveau de leur insertion professionnelle grâce à ces disciplines démentent ces déclarations.