Le point de vue de l’APLV sur le test de positionnement en anglais Evalang

mardi 11 avril 2023

L’APLV REAGIT SUR LE TEST DE POSITIONNEMENT EN ANGLAIS EVALANG ET SUR LE PILOTAGE DU COLLEGE PAR UN OUTIL AUSSI IMPARFAIT

Lors de son Conseil d’Administration du 24 septembre 2022, l’APLV a conduit une réflexion sur le test de positionnement Evalang (page accessible aux adhérents). L’association a par la suite réagi à la circulaire parue au B.O. du 15 décembre sur le collège en indiquant qu’elle refusait l’analyse ministérielle de la faiblesse du niveau en anglais des collégiens à partir du moment où elle était mesurée par un outil inadéquat. L’APLV a défendu ce même point de vue lors de sa dernière entrevue au ministère, le 21 mars, où les deux conseillers du ministre qui l’ont reçue ont mentionné l’unanimité des experts et inspecteurs sur la fiabilité du test Evalang.

Or, il semble que cette unanimité ne soit qu’une fable. Nous venons de signaler la vidéo réalisée par Fiona Ratkoff, IA-IPR d’anglais dans l’académie de Nantes, intitulée « Mon enfant a échoué au test de positionnement : pourquoi ? », dans laquelle elle explique pourquoi les élèves ne réussissent pas les tests Evalang en anglais en classe de 3e. Les raisons avancées par Madame Ratkoff sont les suivantes :

1. Le type de questions « ne correspond pas du tout à l’enseignement » ;
2. Le test évalue la capacité à raisonner plus que la compréhension ;
3. Le caractère évolutif et chronométré du test fait que les élèves qui ne répondent pas aux items d’un niveau du CECRL ne passent pas aux niveaux supérieurs : « le niveau est à peu près bloqué » ;
4. Les élèves n’ont pas l’habitude d’être chronométrés, donc ils sont stressés par les tests ;
5. Les manipulations du clavier ne sont pas claires (on peut confondre le bouton de validation et celui de passage à l’item suivant) et tout retour en arrière impossible ;
6. Les élèves n’ont pas été entraînés.

On pourrait ajouter à cette liste deux autres critiques :
7. Les concepteurs du test considèrent presque constamment de niveau A1 des énoncés qui sont en fait de niveau A2 ou B1 ;
8. Les énoncés de la partie grammaire-lexique sont totalement décontextualisés, le contexte des deux tests de compréhension est minimal et parfois source d’ambiguïtés.

En effet, le raisonnement attendu pour sélectionner le choix attendu dans les QCM s’apparente trop souvent à un jeu de devinette de la pensée du concepteur de la question. La réflexion sur le discours ne peut s’exercer que dans un contexte d’énonciation large et dépourvu d’ambiguïté. Demander de retrouver le verbe manquant dans une assertion décontextualisée est, dans certaines des questions d’Evalang, un jeu de hasard. La preuve en est que, comme l’indique Madame Ratkoff, des enseignants d’anglais et des locuteurs natifs peuvent ne pas réussir certains items, pourtant affichés de niveau A1.

La question qui se pose est la suivante : Pourquoi, face à des tests de positionnement aussi défectueux, aussi peu aptes à évaluer le niveau réel des collégiens de 3e, les experts et inspecteurs évoqués par les conseillers du ministre n’ont-ils pas réagi en masse pour dénoncer Evalang ? Et si cette réaction a eu lieu, pourquoi les conseillers du ministre l’ont-ils niée et ont-ils défendu la fiabilité d’Evalang devant la délégation de l’APLV ?

On n’entrevoit que trois types de réponses possibles. Soit les experts et inspecteurs évoqués par les conseillers du ministre n’ont pas perçu ce qui pourtant saute aux yeux, et cela met une fois de plus en évidence la césure entre la réalité de l’Education Nationale et la vision qu’on en a dans les bureaux du ministère. Soit ces experts et inspecteurs sont muselés par une conception pyramidale du pouvoir, et développent face aux décideurs politiques et administratifs un discours convenu et non polémique. Soit, troisième hypothèse, les conseillers du ministre ont pris le risque de tenir devant les représentants de l’APLV des propos qu’ils savaient être faux, dans le but de ne pas avoir à justifier l’injustifiable, c’est-à-dire qu’ils utilisent les résultats aux tests Evalang comme prétexte pour avancer une réforme de l’enseignement des langues au collège.

Dans les trois cas de figure, il y a lieu de s’inquiéter au sujet de la gouvernance de l’Education Nationale. Des décideurs sans expérience de l’enseignement des langues, refusant d’entendre les analyses des représentants de la profession, arc-boutés sur leurs projets conçus in vitro pour des objectifs autres que didactiques et pédagogiques, ne peuvent qu’agir contre le bon sens et l’efficacité. Ce n’est évidemment pas ce qu’il faut pour améliorer le niveau des jeunes Français en langues vivantes.

Depuis les propos du ministre le 17 septembre sur le collège, « homme malade du système » (« On a un problème avec les langues. Le niveau en anglais a baissé en fin de 3e. On va remettre ça en chantier »), on sait qu’une réforme se profile. Si l’on en juge par la circulaire du 15 décembre, en ce qui concerne les langues, cette réforme va sans doute encourager les apprentissages fondés sur la répétition et le bachotage. L’APLV luttera de toutes ses forces contre le procès fait par le ministère aux méthodes actionnelles, fondées sur la problématisation, la réflexion et la communication collaborative, et de ce fait plus efficaces que les méthodes mécaniques sans lien avec les cultures des pays dont on enseigne les langues.

L’APLV organise le 25 novembre prochain une journée d’étude sur le collège. Elle encourage les professeurs de langues étrangères et régionales à y venir nombreux.

Si vous voulez aider l’association dans la défense de vos valeurs et de vos motivations pour l’enseignement des langues, il est encore temps d’adhérer à l’APLV pour l’année 2023. Rendez-vous sur notre site https://www.aplv-languesmodernes.org