La note du président - N° 2/2010 des Langues Modernes, par Jean-Yves Petitgirard

jeudi 24 juin 2010

Un élève de plus par classe… Groupes de compétence(s)… Évaluation…
Programmes… Rythmes scolaires… Vacances plus ou moins longues… Que de
chantiers ouverts ! Certains fondés, d’autres pour occuper les esprits ou les préparer à de nouvelles réalités ? C’est en tout cas une réelle interrogation. Pour les enseignants de langues, parler d’effectifs à la hausse renvoie inévitablement à des difficultés supplémentaires, cela reste cependant une piste envisagée par notre Ministre, bien sûr dans le primaire pour le moment, mais après ? Ce qui est quelque peu déstabilisant, c’est de constater, sur le site même du ministère, l’existence d’un rapport qui, à l’opposé, montre le bien-fondé d’une réduction d’effectifs sur la réussite scolaire :
« Une réduction d’un élève par classe de de la taille de CE1 conduit à une augmentation de 0,7 point du score obtenu par les élèves défavorisés aux évaluations de mathématiques de début de CE2. D’après ces estimations, la suppression de la légère politique de ciblage des moyens actuellement en vigueur en faveur des ZEP (taille moyenne des classes de 20,9 en ZEP, contre 22,8 hors ZEP) conduirait à une progression de 14 % de l’écart moyen de réussite scolaire entre écoles ZEP et non-ZEP. Inversement, une forte politique de ciblage (réduction supplémentaire de cinq élèves des tailles de classe en ZEP, à moyens constants) conduirait à une réduction supplémentaire de 46 % de l’inégalité de réussite scolaire. » [1] Qui croire ? À l’évidence, plus on augmente les effectifs, moins nous avons besoin d’enseignants, mais est-ce la seule logique à adopter ?

La réforme du lycée a définitivement intronisé le CECR, comme « la » référence à suivre. Ce qu’il faut bien voir, c’est qu’une telle décision n’est pas neutre en termes de complexité de mise en oeuvre. Elle nécessite, et nous l’avons dit, clarification, formation, accompagnement. Clarification, c’est une évidence, car entre « groupes de niveaux », « groupes de compétence(s) », « groupes de niveaux de compétence »,
s’il y a une réelle différence, elle ne saute pas aux yeux. Formation, c’est la clé de voûte indispensable à la réussite. Les approches de type « communicatif » d’une part et « actionnel » d’autre part, ne se partagent pas le champ pédagogique de façon évidente. Ainsi, se donner comme objectif d’envoyer ses élèves sur le forum d’un voyagiste pour participer à divers échanges pourrait passer comme « actionnel ». En réalité, cela reste du « communicatif » ; la perspective actionnelle n’interviendrait que si le passage sur un tel site avait pour objectif de permettre à l’élève de trouver
les informations nécessaires pour corroborer un choix, pour justifier une décision,ou simplement pour prendre la bonne décision concernant un projet de voyage.
Il y a donc nécessité de former les collègues à de telles réalités. Accompagnement enfin, il s’agit en quelque sorte de la formation continuée, permettant de stabiliser les concepts, maîtriser les mises en oeuvre, etc.

À l’issue de notre entrevue avec un conseiller du Ministre en mars dernier, nous vous avions fait part de la nécessité de mener une réflexion sur le format d’une nouvelle épreuve de langue vivante dans le futur baccalauréat. Il est clair qu’à l’horizon 2013, après trois années d’enseignement des langues dans une optique « groupes de compétence » et perspective actionnelle, le baccalauréat ne peut plus conserver sa forme actuelle, il y a nécessité de repenser l’épreuve en prenant en
compte ces nouvelles données. C’est un des objectifs que nous nous sommes fixés au sein de l’APLV et, pour ce faire, nous allons mettre en place un groupe de réflexion en charge de faire des propositions à
valider par l’ensemble des adhérents et à proposer au ministère.

Dans ce même ordre d’idées, nous vous proposons de nous retrouver lors de notre Assemblée Générale les 27 et 28 novembre 2010 (à Paris, lieu à défi nir), dont le thème sera « La problématique de l’évaluation ».
Avant de conclure cette brève Note du président, je voudrais au nom de l’APLV rendre un hommage à François Poirier, décédé il y a peu. Spécialiste de l’histoire contemporaine de la Grande-Bretagne à Paris 13 et Vice-Président de la SAES, il a toujours maintenu des relations privilégiées avec l’APLV, co-organisant notamment les rencontres d’anglicistes de Villetaneuse, en août 2001, consacrées à l’enseignement
de la civilisation en classe de langue. Il avait pris une part active dans
les mouvements de réaction à la mise en place de la réforme de la formation des enseignants en 2009.

Lorsque vous lirez ces lignes, vous serez sans doute en vacances, nul doute bien méritées. Je vous souhaite donc un bel été de bonnes vacances.


[1« Une réduction d’un élève par classe de de la taille de CE1 conduit à une augmentation de 0,7 point du score obtenu par les élèves défavorisés aux évaluations de mathématiques de début de CE2. D’après ces estimations, la suppression de la légère politique de ciblage des moyens actuellement en vigueur en faveur des ZEP (taille moyenne des classes de 20,9 en ZEP, contre 22,8 hors ZEP) conduirait à une progression de 14 % de l’écart moyen de réussite scolaire entre écoles ZEP et non-ZEP. Inversement, une forte politique de ciblage (réduction supplémentaire de cinq élèves des tailles de classe en ZEP, à moyens constants) conduirait à une réduction supplémentaire de 46 % de l’inégalité de réussite scolaire. »