« L’Europe post-Brexit », Questions Internationales, n°110 (novembre-décembre 2021), 9€
On pourra s’accorder pour dire qu’on manque encore de recul pour se pencher avec exhaustivité sur la question suggérée par le titre de ce numéro de Questions Internationales, l’Europe après le Brexit, mais le mérite de ce dossier est que les auteurs des différentes contributions s’appuient sur l’avant 2016 pour analyser la situation actuelle et se projeter dans l’avenir des relations des 27 avec le Royaume-Uni.
Plusieurs des auteurs évoquent ce qu’Hans Stark nomme un « minilatéralisme », c’est-à-dire l’existence de relations privilégiées entre un tout petit nombre d’états sur un dossier de coopération particulier. En matière de politique de défense et de sécurité, par exemple, le bilatéralisme franco-britannique, qu’évoque Thibaud Harrois, ou les liens entre Allemagne, France et Royaume-Uni au sein du E3, analysés par Hans Stark, ne semblent pas subir les effets du Brexit de manière flagrante. Cela permet peut-être de porter un regard légèrement plus modéré sur le Brexit, qui serait pour les Britanniques davantage une rupture avec une Union Européenne bureaucratique et contraignante qu’un divorce total avec le continent.
Les deux chercheurs proposent des analyses très complètes et convaincantes, le premier sur les nouvelles relations du Royaume-Uni avec l’Union Européenne, le second sur le binôme germano-britannique. Hans Stark souligne d’ailleurs le paradoxe que représente depuis le Brexit le remplacement de la bureaucratie européenne par une bureaucratie britannique, tout aussi rebutante, évidemment, pour les entreprises étrangères. Les professeurs d’allemand et d’anglais de lycée ou en classes préparatoires trouveront dans ces deux articles des études précises et étayées, qui les aideront à poser le cadre d’une étude de supports dans les langues qu’ils enseignent.
Dans un sens plus large, les professeurs de toutes les langues (y compris régionales) trouveront dans ce numéro de Questions Internationales des synthèses très complètes sur certains domaines de la coopération européenne. Contrairement à ce qu’annonce le titre général du dossier, de nombreux articles n’évoquent le Brexit que de manière périphérique. Ils permettront aux professeurs de faire le point pour eux-mêmes et/ou pour leurs élèves par exemple sur la gestion par l’Union Européenne de la pandémie de coronavirus (Maxime Lefebvre), sur la politique d’immigration (Matthieu Tardis), sur la gouvernance de l’Union Européenne (l’auteur de l’article, Samuel Faure, reprend le concept de « polyarchie » de Robert Dahl pour évoquer la multiplicité des sources de pouvoirs décisionnels au sein de l’Union), sur les relations gazières avec la Russie (Catherine Locatelli), ou sur les langues et le territoire européen (Barbara Loyer).
C’est l’article de Barbara Loyer qui intéressera sans doute au premier chef les professeurs de langues régionales. Ils y trouveront en quelques paragraphes une analyse de la situation institutionnelle et des réalités de la politique des langues régionales dans les différents pays de l’Union.
Jean-Luc Breton