Le premier clic de l’année 2023 a été donné jeudi 12 janvier par la psycholinguiste Isabelle Nocus, de l’université de Nantes, dans une intervention qui complétait bien le programme de la journée d’étude ADEB-APLV du 3 décembre sur l’enseignement bilingue et l’immersion.
Isabelle Nocus a commencé par proposer une définition de la compétence bi-/plurilingue. Pour elle, sont considérés comme bi- ou plurilingues les personnes qui se servent de deux ou plusieurs langues dans leur vie de tous les jours. L’école faisant partie de la vie, un enfant qui parle une ou plusieurs langues à la maison et français à l’école est bi- ou plurilingue.
Il s’agit donc d’abandonner la représentation doxique du bi-/plurilinguisme comme l’accès à une maîtrise quasi native de sa ou de ses L2. Une autre représentation qu’Isabelle Nocus sape est celle que l’enseignement en L2 conduit à de meilleures performances que l’enseignement en langue maternelle.
Certes, de nombreuses études internationales montrent que les élèves qui suivent un enseignement bilingue sont plus créatifs, ont une plus grande conscience phonologique, une meilleure mémoire, de plus vastes aptitudes métalinguistiques que les enfants scolarisés en LM, mais Isabelle Nocus nous rappelle utilement que des milliers d’enfants bi-/plurilingues issus de l’immigration ou résidant dans les DOM et pays d’Outre-Mer réussissent beaucoup moins bien à l’école française que les petits Français monolingues de métropole.
Les recherches menées par Isabelle Nocus, en particulier en Guyane, Nouvelle Calédonie et Polynésie, montrent que, pour être efficace, un enseignement de langue doit d’abord valoriser les langues au même niveau chez les élèves, créer ce qu’elle appelle « un concept de soi en langue ». Il faut ensuite développer les capacités des enfants dans les deux langues, capacités cognitives (développer une bilittéracie, même dans les langues réputées sans écriture), et capacités métacognitives (faire raisonner les élèves en L2, leur faire prendre conscience de leurs processus d’apprentissage).
Isabelle Nocus signale les évolutions qu’il y a eu depuis 20 ans, mais aussi les résistances institutionnelles, familiales et sociétales qui perdurent.
Le prochain clic de l’APLV aura lieu le jeudi 26 janvier 2023 à 18h30. Danièle Bergère, enseignante au CASNAV de Paris, nous parlera des représentations qu’ont les élèves allophones de leur apprentissage. Vous pouvez d’ores et déjà vous inscrire en écrivant au webmestre de l’APLV : web@aplv-languesmodernes.org